Si la pollinisation est évidemment nécessaire pour la fécondation des arbres fruitiers, elle l’est d’autant plus chez le kiwi. Surtout si l’on veut obtenir de beaux et gros kiwis, comme on les aime.

La culture du kiwi est très présente dans les Pyrénées-Atlantiques. C’est une filière agricole qui se développe toujours et qui, comme les autres, fait face aux risques et aléas de la nature. C’est donc tout naturellement que nous sommes allés monitorer les amours du kiwi et des abeilles entremetteuses.

gros et jolis kiwis

Qu’est-ce que la pollinisation croisée ?

L’actinidia (plante du kiwi) est une plante que l’on appelle « dioïque », ce qui veut dire qu’il existe des pieds mâles et des pieds femelles. Pour que les fleurs femelles soient fécondées, le transfert du pollen des plants mâles vers les plants femelles doit s’opérer. C’est ce qu’on appelle une pollinisation croisée. Autrement dit, les plants mâles vont porter le pollen et les plants femelles vont porter les fleurs qui produisent le fruit.

Fleur femelle de l’actinidia kiwi
Fleur femelle de l’actinidia
Fleur mâle de l’actinidia kiwi
Fleur mâle de l’actinidia

De ce fait, deux contraintes s’imposent : La première est qu’il faut rapprocher les pieds mâles des pieds femelles. On retrouve souvent un ratio de 1 pied mâle pour 5 femelles. La deuxième est que le transfert de pollen ne peut pas se faire uniquement grâce au vent ; la présence d’insectes pollinisateurs est incontournable.

Au-delà de la nécessité d’une pollinisation croisée, l’actinidia n’est pas une plante comme les autres. Chaque fleur possède un grand nombre de stigmates (environ 40) et d’ovules (environ 1500), alors plus la pollinisation sera intense, plus l’on obtiendra de beaux kiwis. En effet, une fois déposé sur le stigmate, le grain de pollen créé un tube pollinique qui traverse de style et qui achemine les gamètes mâles à l’ovule. C’est ainsi que s’opère la fécondation. Un grand nombre de grains de pollen permettra donc la fécondation d’un plus grand nombre d’ovules.

Schéma de la fleur femelle de l’actinidia
Schéma de la fleur femelle de l’actinidia

Pour ne rien simplifier, l’actinidia est également un peu radine. Pour du pollen elle en a à revendre, mais côté nectar c’est niet ! Point de nectar chez actinidia. Bien entendu, les abeilles n’aiment pas les plantes radines et peuvent vite se désenchanter et aller voir ailleurs.

Cqfd : Polliniser du kiwi c’est tout un programme

Donc synthèse de l’affaire : nous avons une plante qui doit transférer du pollen d’un pied male vers des pieds femelles à l’aide des insectes. La charge en pollen doit être importante pour arriver à féconder les centaines d’ovules de chaque fleur et en plus l’insecte qui joue l’intermédiaire n’aura aucune récompense en nectar pour l’inciter à bien travailler ... 🤔.

A ce point il est clair que si vous voulez de beaux kiwis, il vous faut beaucoup, beaucoup d’abeilles et des abeilles efficaces ! 🚀 Et la question est bien là : comment se passe dans les faits la pollinisation ?

C’est ce que nous sommes allés monitorer en ce mois de mai dans une exploitation de kiwis, près d’Oloron dans les Pyrènes Atlantiques (64).

Suivi en temps réel de la pollinisation du kiwi

La floraison de l’actinidia intervient entre mai et juin. Pour suivre l’ensemble de la pollinisation, les ruches ont été équipées du 17 mai au 9 juin, soit 22 jours, dans une culture de kiwi de 3 hectares.

Ruches connectés pour suivre la pollonisation du kiwi
Ruches connectés pour suivre la pollonisation du kiwi près d'Oloron (64)

Au total, 3 ruches ont été connectées, chacune avec une balance, un capteur interne et un compteur d’abeilles. Les balances ont été conçues sur-mesure afin de s’adapter aux bâtis utilisés par l’apiculteur, à partir d’un kit W3 . À proximité sont installés une station météo et un Hub qui nous permettra d’observer les relevés à distance.

Balances sur mesure
Balances sur mesure adaptées aux bâtis de l’apiculteur

 

Compteur d'abeilles
Compteur d'abeilles

La balance permet de suivre le poids de la ruche et d’en déduire la quantité de nectar et de pollen. Le kiwi produisant très peu de nectar, les abeilles ne devraient ramener que du pollen et tirer dans leurs réserves pour le reste. La sonde interne permet de déterminer la quantité de couvain et l’état de la colonie. Le compteur d’abeilles, installé à l’entrée de la ruche, donne des indications sur les entrées et sorties d’abeilles. Il permet de savoir à quel moment les abeilles sortent le plus, par quel temps etc. Ces mesures corrélées avec les indications données par les mesures ambiantes permettent de bien caractériser le déroulement de la campagne.

Résultats

A la fin de la campagne qui a durée 22 jours nous avons acquis une base de données très conséquente qui nous apprend énormément de choses. D’ores et déjà, très clairement il y a plusieurs aspects qui peuvent être avantageusement exploités par l’apiculteur et/ou l’agriculteur :

Le suivi et la prévision de la dynamique des colonies permet à l’apiculteur d’identifier à temps les actions nécessaires, notamment pour le nourrissement. On parle ici de prévenir plutôt que de guérir. Il faut à tout prix éviter que les colonies s’affaiblissent car c’est aussi la miellée suivante qui est en jeu.

Pour l’agriculteur on aura vu à quel moment les abeilles se désintéressent de la culture et passent à « autre chose ». Ceci combiné avec une semaine de météo maussade aura ramené la pollinisation effective du kiwi à une poignée de jours.

A l’aide de ces données et enseignements, nous avons déjà hâte de voir arriver la prochaine floraison. L’année prochaine nous devrions savoir projeter en amont ce type d’opérations pour en améliorer l’efficacité.

Si la prochaine fois au supermarché vous trouvez des gros et beaux kiwis, dites-vous que BroodMinder est peut-être passé par là 🥝


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